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4 novembre 2010 4 04 /11 /novembre /2010 06:33

one.jpgIl est inouï et au fond à la longue banal de constater à chaque fois (tel le lancinant mouvement d'une horloge à balancier) que les mêmes analyses étriquées et tronquées sont balancées sur ce qui se passe aux USA et aujourd'hui en Europe et que l'on peut résumer par deux mots fourre tout:ultra conservatisme, populisme.

On connaît la formule " si la réaction du peuple déplaît, il faut le dissoudre", elle devient de plus en plus d'une brûlante actualité : le peuple réagit ? Il est donc réactionnaire, CQFD. N'oubliez pas que selon la théorie sociologique à la mode depuis la révolution française consiste à marteler que le peuple est inculte ; Bourdieu a ajouté que la culture populaire n'existe pas, seule la culture des élites existe donc les élites doivent éduquer le peuple, lui apporter la lumière, l'illuminer y compris avec des lubies.

L'illuminisme au fond n'est pas ce que l'on croit.

L'art contemporain en tout cas, dans ses mouvements extrêmes, en avait déjà fait la démonstration : s'il reste encore deux personnes dans la salle, faute sans doute ne pas avoir "réagi comme il faut" c'est que le metteur en scène n'a pas "été assez loin"… 

 On aura donc tout entendu sur ces élections américaines : jusqu'à indiquer un retour ou le maintien du racisme qui expliquerait le revers ("la raclée" dit Obama, ce qui a dû faire rager un BHL qui ne cessait de minimiser l'échec) ; le Monde reprenant par exemple une dépêche de CNN: 

MIDTERMS – Aucun Noir au Sénat américain 

 

alors que sur Fox News on pouvait lire : "Two black Republican victories tonight mark the first time African-Americans will represent the GOP in Congress in seven years".

 Curieux que les "racistes" républicains aient des candidats noirs non ? (C'est d'ailleurs devenu une blague sur Fox news : le journaliste blanc demande son avis au nouveau représentant noir républicain et lui dit en fin d'interview : je n'arrive pas à trouver de taxi pour aller à l'aéroport, et le nouveau député noir lui répond : ne vous inquiétez pas j'ai gardé ma casquette de chauffeur de taxi noir, j'arrive !… )…

Combien de députés socialistes verts UMP de couleur mmh ?… Les Républicains ont nommé coup sur coup deux secrétaires d'Etat noirs aux affaires étrangères, qui s'en souvient ?…Une gouverneure républicaine est d'origine latino, Suzanna Martinez, et un sénateur Tea Party, Mark Rubio, a été élu grâce aux voix latino…

Qu'en dit Associated Press repris par Yahoo news  ? Ceci : " Selon Richard Ivory, consultant républicain noir et fondateur du blog politique et musical Hip Hop Republican, c'est avant tout l'opposition à Barack Obama qui a compté, et non la "couleur de peau".

"Il fut un temps où l'électorat blanc voyait d'abord la race (du candidat) et fondait son jugement uniquement là-dessus. Quand les républicains noirs et Obama sont en désaccord idéologique, le message l'emporte sur la couleur de peau", analyse-t-il ".

 

On admire ainsi l'objectivité du (feu) journal Le Monde, nouvelle danseuse de  Pierre Bergé (qui a eu la peau du téléthon) que celui-ci affinera soyons-en sûr vers plus de progressisme, entendez plus de multiculturalisme ou l'anti-France éternelle (je propose d'ailleurs de retirer ce nom de "France" si discriminant…) et plus d'homosexualisme au sens où l'homosexualité n'est pas perçue comme une tendance sexuelle mais un marqueur culturel obligatoire pour apparaître ouvert (un “ élément de progrès des civilisations " avait écrit Hugo Marsan in Le Monde du 7/3/97 à propos d'un livre de Henning Bech : When men meet : homosexuality and modernity) ; pas étonnant que, par réaction (justement…), un Berlusconi dérape (lui le nouvel ami de Kadhafi, c'est dire…) et que (précisément ?) l'islam progresse afin d'éviter cette fatalité…

 

C'est justement ce que ne veut plus le Tea party… cette idée que le "changement", la modernité en un mot, rime avec dissolution, que la critique rime avec destruction, le pluralisme avec relativisme, la sexualité avec l'idéologie queer (à l'heure pourtant du développement "durable" mis à toutes les sauces).

Mais la cause semble entendue, du Figaro au Monde : tea party c'est "ultra" de chez ultra, point final. L'analyse est reposante. Et ces fins experts bien de chez nous (se référant aussi au mépris pour " L'Amérique profonde" de tel écrivain américain newyorkais en vogue de passage à Paris, Paris qui s'y connaît en mépris, celui, déjà ancien, de la "France profonde"…) n'ont pas la dent assez dure pour relever la position singulière de telle ou tel sur ses opinions religieuses et sexuelles (deux marqueurs essentiels on l'a dit plus haut des batailles spirituelles actuelles et qui ne vont que s'amplifier).

 

Pourtant, et comme il a été déjà noté ici, l'ancienne batteuse du groupe rock Velvet underground dit "Moe" ne pense pas avoir viré sa cutie lorsqu'elle justifie sa participation à une réunion du Tea Party en Georgie du Sud : " "Anyone who thinks I'm crazy about Sarah Palin, Bush, etc., has made quite the presumption. I have voted Democrat all my life, until I started listening to what Obama was promising and started wondering how the hell will this utopian dream be paid for?"

 

Nous touchons à l'essentiel, et ceci nous concerne aussi en France, en Europe et ailleurs : que dit cette femme (dont le passé parle pour elle en matière d'expérimentations sociétales) sinon qu'elle s'inquiète sur le fait que de plus en plus et ce au nom d'une connaissance supérieure "on" la somme de rogner sa liberté, de changer de conscience comme l'on change de chemise, et tout cela au nom du changement, du progrès, de la Terre, etc etc, alors que cette obligation d'amoindrir la liberté d'être pour accomplir une utopie appauvrit sape étouffe en réalité et la nécessité du changement et le hasard de la liberté, voilà le paradoxe : une idéologie, énième métamorphose du purisme hyper-rationaliste qui après avoir voulu changé de calendrier (Robespierre, remis à la mode par Badiou),changé l'homme avec des moyens institutionnels (Communisme, nazisme), prétend le changer en le rééduquant en lui interdisant ceci et cela. Tout en montrant du doigt le marché la liberté alors que ce sont par ces paramètres que les pays émergents sortent enfin la tête de l'eau enfoncée pendant des décennies par les mêmes qui veulent aujourd'hui finir le job en France et ailleurs. Ce n'est pas la liberté qui appauvrit mais l'étatisme et l'affairisme qu'il encourage (comme recevoir en grandes pompes le dictateur chinois parce que le marché public permettra de saupoudrer les miettes clientélistes…).

 Certains Américains, de toutes tendances, se sont levés et disent "stop" ! Voilà l'âme du Tea Party : take our country backrendez-moi la Constitution qui le fonde. Laissez-moi éduquer mes enfants comme je l'entends, laissez ma sexualité tranquille, ne parlez pas au nom de la science (que vous critiquez par ailleurs…) laissez-moi croire à ce que je veux. Ne dites pas que le refus de la dissolution des frontières c'est du racisme alors que l'on vante tel ou tel peuplade soucieuse de préserver sa vie privée jusqu'à refuser la présence d'étrangers.

Anecdote : une suissesse cinéaste à ses heures était en pleine extase dans un hôtel quatre étoiles (conférence mondiale sur l'entreprenariat) lorsque la tribu amérindienne qu'elle voulait filmer lui a demandé de partir afin que sa présence n'interfère pas avec la leur ; et lorsque j'ai fait remarquer que ce genre de réaction serait taxée d'extrême droite s'il s'agissait de natifs occidentaux, et que cela me rappelait que même à la fin du 19 ème siècle, le premier missionnaire chrétien arrivé en Corée eut la tête coupée, elle me répondit que les Coréens avaient eu raison… Mais, insistons lourdement, lorsqu'il s'agit d'Occidentaux qui veulent préserver leur mode de vie on les traitera de (néo)réactionnaires.

Par exemple, l'on a fait un véritable procès en "sorcellerie" à Christine O'Donnell candidate battue du Tea Party dans le Delaware (elle avait, certes, donné dans le spiritisme, critiqué la masturbation avant le mariage, et sa campagne n'était pas nécessairement des plus marquantes: "je suis vous"…) sauf que ses opinions n'ont rien à voir avec ses positions sur la fiscalité, l'Etat minimum etc, elle a le droit de penser ce qu'elle veut, et on a le droit de ne pas être d'accord avec elle sans pour autant la déterminer de réactionnaire alors que les gens qui jugent ainsi refusent qu'on les étiquette par exemple de totalitaire… Cependant, sur un point tout de même, ses ennemis n'ont pas tort il est sûr que si elle avait été élue sénatrice comme ses deux camarades du tea Party, elle se serait battue en effet pour que la santé l'éducation redeviennent des libertés de base. Non à la République de Platon, de Robespierre et de Lénine.

 Et cela "nous" concerne aussi.

 Car cela ne veut pas dire, du moins pas nécessairement contrairement à ce que l'on prétend,  que dans ce cas là le créationnisme, l'intelligence design, l'anti-avortement, seront les seules matières et pratiques enseignées obligatoirement dans des écoles devenues religieuses et privatisées, ou encore que l'inégalité explosera encore plus  si chacun se soigne et se protège.Cela veut d'abord dire qu'il ne faut pas confondre la connaissance scientifique, et l'opinion spirituelle, qu'en un mot l'on peut fort bien enseigner le darwinisme et étudier divers discours expliquant autre chose ; l'obligation d'Etat, c'est-à-dire républicaine (res publica), étant de veiller à ce que le darwinisme ne soit pas évincé des écoles même privées, voilà le débat essentiel entre en effet laïcs et religieux. Dans ce cadre là, il est possible de dissoudre les ministères de l'éducation, de la santé, de l'industrie, etc, parce que ce n'est pas en sommant les gens de ne plus fumer et de ne plus boire que l'on sauvera la "sécu", c'est d'une part en libérant le système de santé (tout en permettant la constitution d'un fonds de solidarité défalqué de l'impôt), c'est d'autre part en essayant de comprendre ce besoin d'ivresse de tabac, c'est en essayant de saisir pourquoi l'effondrement spirituel du religieux en Occident n'a pas vu surgir pleinement cette éthique sociale qu'un Durkheim avait espéré construire afin que les humains puissent s'appuyer sur ce qui est réellement bon en écartant le réellement mauvais, puisqu'il ne suffit pas de dire ce qui "est" bien et mal…

 

On le voit : la poussée du Tea Party, la montée des mouvements critiques envers le multiculturalisme, signifient bien autre chose que le conservatisme en soi ou les effets de "la" crise économique.

En tout cas ce n'est pas par l'étatisme et la diabolisation que l'on arrivera à y répondre. Il s'agit d'une révolte de la société civile contre l'élite étatiste qui pense qu'il suffit de manipuler des modèles mathématiques pour saisir le réel humain. C'est là où ils se trompent, lourdement.

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